L’ église de Vétheuil et la révolution

L’histoire de l’église de Vétheuil à l’époque de la révolution française est indissociable de celle de l’abbé Jean Nicolas Guillaume de Gouville de Bretteville qui fut curé de Vétheuil de 1772 à 1820.

Un bref rappel des faits s’impose :

Avant la révolution, le catholicisme est religion d’Etat.

Le 2 novembre 1789, après plusieurs semaines de débats, l’Assemblée nationale décrète par une large majorité que les biens du Clergé appartiennent à la nation.

En 1791, on demande aux prêtres de prêter serment de fidélité à la Nation. Impossible pour eux, qui déclarent ne dépendre que du Pape. Certains acceptent de prêter serment et deviennent ce qu’on appelle les jureurs, d’autres refusent et entrent en clandestinité – ils sont appelés les prêtres réfractaires. Pris, ils sont emprisonnés ou tués. 

En 1793 c’est le point ultime du choc. On ferme les monastères et les couvents, les abbayes sont vendues. On vide les églises des objets du culte. On fond les cloches pour en faire des canons. On ira jusqu’à vider les tombes pour faire du salpêtre. Des églises deviennent des écuries, des entrepôts. 

Cette période est le début de ce que l’on a appelé « le vandalisme révolutionnaire ». Du vandalisme à la destruction massive, certains franchirent le pas par haine du clergé, par rage de détruire des symboles religieux ou par cupidité.

« Des églises abandonnées, des clochers sans cloche, des cimetières sans croix, des saints sans tête… » Chateaubriand.

La religion catholique est désormais interdite. C’est le concordat de 1801 signé entre le Consulat, le gouvernement de la France et Rome qui met fin à cette période de troubles. L’Etat prend alors à sa charge les rémunérations des prêtres catholiques et prend possession des bâtiments à charge pour l’Eglise de les entretenir. Tout cela dure un peu plus de 100 ans jusqu’à la loi de 1905 qui sépare les églises, autrement dit les religions, et l’Etat qui cesse de les financer. C’est la période que nous vivons actuellement.

Que se passa-t’il à Vétheuil à cette époque ? Il n’y a pas de témoignages directs sur les faits de vandalisme mais tous les emplacements de statues laissés vides autour du portail ouest et du portail sud témoignent d’une destruction systématique de toute la statuaire. L’intérieur de l’église aurait été épargné des pilleurs et destructeurs, préservant ainsi le patrimoine précieux, les trésors que nous connaissons aujourd’hui.

Une vue du portail ouest et des emplacements vidés de leurs statues

Quant à l’abbé de Gouville de Bretteville, il a connu une période très sombre. :

Il prête serment à la Constitution civile du clergé en 1791 et devient membre du Conseil général de la commune en 1792. A ce titre, il rédige les actes d’état civil. Sous la Terreur, quand le culte est interdit, il se cache chez les Bénédictines de Villarceaux.

En janvier 1799, l’abbé est considéré comme dangereux et déporté vers l’île de Ré. Malgré une pétition des habitants en sa faveur, il ne sera libéré qu’au mois de mars de l’année suivante. Il est confirmé comme curé de Vétheuil en 1803 et récupère le presbytère. Il démissionne en 1820 et s’éteindra paisiblement à son domicile en 1823.

La porte du bagne de Saint Martin de Ré

Survivant de la terreur, il a dû sa longévité … à la flotte anglaise (dont la présence en mer a obligé les révolutionnaires à renoncer à l’acheminement des proscrits jusqu’à la Guyane où ils auraient probablement péri), à Bonaparte dont le coup d’état du 18 Brumaire a mis fin à l’époque révolutionnaire, et à une résistance hors du commun.

Le témoignage de cette époque révolutionnaire qui est encore visible dans l’église est sur l’autel de La Chapelle des charitons. C’est le morceau de planche (*) portant l’inscription « « Le peuple français reconnaît l’Être suprême » dont l’abbé de Gouville de Bretteville a utilisé la partie droite pour réparer l’autel en partie cassé.

(*) Cette planche avait été fixée sur la porte de l’église.

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